Votre proche en EHPAD[1] était dépendant, alité ou en fauteuil, et les soignants savaient qu’il présentait un risque élevé de développer une escarre[2]. Pourtant, aucune mesure de prévention adaptée n’a été mise en place. Résultat : une plaie grave est apparue avec des conséquences lourdes sur sa santé. Aujourd’hui, vous souhaitez que cette faute soit reconnue, que justice soit faite et que d’autres familles n’aient pas à subir la même douleur. Dans cet article, nous vous expliquons dans quels cas une maison de retraite peut être poursuivie en justice pour négligence liée à une escarre[2], comment constituer un dossier solide et quels recours engager pour obtenir réparation.
Est-il possible de porter plainte contre un EHPAD[1] pour négligence en cas d’escarre[2] ?
Oui, un EHPAD[1] peut être poursuivi pour négligence si un résident développe une escarre[2] évitable, liée à un défaut de soins ou à une surveillance insuffisante.
Les escarres sont des lésions cutanées qui apparaissent lorsque la peau reste comprimée trop longtemps, notamment chez les personnes alitées ou en fauteuil roulant. Elles sont souvent considérées comme un indicateur de la qualité des soins dans un établissement.
Lorsqu’elles surviennent sans justification médicale valable, elles peuvent être interprétées comme le signe d’une négligence, voire d’une maltraitance passive. Les proches peuvent alors engager une procédure pour faire reconnaître la faute de l’établissement.

Comment poursuivre une maison de retraite pour négligence ?
Lorsqu’une escarre[2] grave se développe faute de prévention adaptée, la loi permet aux familles d’engager la responsabilité de l’établissement. Qu’il s’agisse d’une démarche pénale ou civile, plusieurs fondements juridiques peuvent être mobilisés pour faire reconnaître la négligence et obtenir réparation.
La responsabilité pénale en cas de maltraitance ou de négligence de l’EHPAD[1]
L’article 121-2 du Code pénal prévoit que les personnes morales, comme les EHPAD[1], peuvent être tenues responsables des actes ou omissions de leurs représentants. Dans le cas d’une escarre[2] sévère due à un défaut de soins, plusieurs infractions peuvent être retenues :
- homicide involontaire (article 221-6), si l’escarre[2] entraîne la mort du résident ;
- mise en danger de la vie d’autrui (article 223-1), si la maison de retraite médicalisée a exposé le résident à un risque grave par manque de soins ou d’hygiène ;
- non-assistance à personne en danger (article 223-6), si le personnel n’est pas intervenu alors que la situation le nécessitait.
Des plaintes peuvent être déposées auprès du procureur de la République. Si l’enquête révèle des manquements graves, une procédure pénale pourra être engagée.
La responsabilité civile pour obtenir réparation
Sur le plan civil, l’objectif n’est pas de sanctionner, mais d’obtenir une indemnisation pour les préjudices subis. En vertu de l’article 1231-1 du Code civil, un établissement peut être condamné à réparer les dommages causés par le non-respect de ses obligations contractuelles. Ces dernières incluent la qualité des soins prodigués aux résidents, leur sécurité, ainsi que le respect de leur dignité.
Dans le cas d’une escarre[2], la famille peut demander réparation pour :
- le préjudice matériel subi : frais médicaux, hospitalisation, soins spécialisés ;
- le préjudice moral subi : souffrance psychologique du résident et des proches ;
- le préjudice d’affection, en cas de décès ou de forte dégradation de l’état de santé.
La procédure civile devant le tribunal judiciaire est souvent plus rapide et accessible, notamment lorsque la volonté n’est pas punitive, mais réparatrice.
Vous pouvez engager à la fois une procédure pénale et une action civile. Cette approche combinée permet de croiser les éléments de preuve et d’augmenter les chances de faire reconnaître la faute tout en obtenant une indemnisation plus complète.
La responsabilité administrative si l’EHPAD[1] est public
Lorsque l’EHPAD[1] est un établissement public, la responsabilité engagée relève du droit administratif. La procédure se fait donc devant le tribunal administratif et non devant les juridictions civiles. Et dans ce cas, c’est la faute de service qui doit être prouvée pour obtenir réparation. Cela signifie que la famille doit démontrer que l’établissement, en tant qu’entité publique, a manqué à ses obligations de soins, entraînant la survenue ou l’aggravation de l’escarre[2].
Peut-on agir collectivement contre un EHPAD[1] ?
En France, l’action de groupe permet à plusieurs victimes d’un même préjudice de se rassembler pour mener une action judiciaire commune. Cela peut être une option pertinente si plusieurs résidents d’un même établissement ont souffert de négligence ou d’escarres dans des conditions similaires.
Cependant, ce type d’action est encadré par des règles strictes et reste difficile à mettre en œuvre dans les litiges liés aux soins. Elle est généralement réservée aux associations agréées, et sa mise en œuvre dans les affaires d’EHPAD[1] reste marginale.
Dans quels cas parle-t-on de négligence lors de la survenue d’une escarre[2] en établissement pour personnes âgées ?
La négligence est caractérisée lorsqu’il y a eu un manquement aux obligations de soins. Dans le cadre de l’escarre[2], il peut s’agir de :
- l’absence de mobilisation régulière d’un résident alité ;
- un défaut de surveillance malgré des signes visibles d’alerte ;
- un manque d’hygiène corporelle ou de soins adaptés ;
- une réponse tardive à une demande de soins ou à une alerte médicale.

Comment prouver une négligence liée à une escarre[2] ?
Pour qu’une action en justice ait des chances d’aboutir, il est essentiel d’établir un lien de causalité direct entre la formation ou l’aggravation de l’escarre[2] et un manquement de l’EHPAD[1] à ses obligations de soins. Cela nécessite de constituer un dossier solide, appuyé par des preuves solides :
- le dossier médical du résident permet d’évaluer les soins réalisés, les diagnostics posés et les décisions prises lors des consultations médicales ;
- les témoignages d’autres résidents, de proches ou même d’anciens membres du personnel peuvent donner des détails sur les conditions réelles de prise en charge ;
- des photos de l’évolution de la peau puis de la plaie sont souvent cruciales pour démontrer l’absence d’intervention rapide ou adaptée ;
- une expertise médicale indépendante, généralement ordonnée par un juge ou une assurance, peut confirmer que l’escarre[2] était évitable avec des soins appropriés.
Il est également déterminant de prouver que l’établissement n’a pas respecté les protocoles de prévention des escarres, notamment en ce qui concerne les changements de position réguliers, le maintien d’une hygiène rigoureuse, la surveillance de l’état cutané et le suivi nutritionnel.
Que faire en cas de suspicion de négligence ?
Si vous suspectez une négligence liée à la prévention d’escarre[2], n’attendez pas pour agir et assurer une prise en charge adaptée à votre proche. Voici les principales étapes à suivre :
- constituer un dossier : conservez tous les éléments médicaux et témoignages ;
- saisir la direction de l’EHPAD[1] pour signaler les faits ;
- faire un signalement à l’ARS (Agence régionale de santé) ou au Défenseur des droits ;
- consulter un avocat spécialisé en droit de la santé ou en droit des victimes ;
- porter plainte si nécessaire, au pénal ou au civil selon la situation.
Quels sont les obstacles à une condamnation de l’EHPAD[1] en cas de négligence ?
Malgré les droits reconnus aux personnes âgées et aux familles, plusieurs difficultés peuvent ralentir ou empêcher la plainte d’aboutir :
Des procédures longues et complexes
Les affaires pénales en particulier peuvent durer des années. Les étapes sont nombreuses : dépôt de plainte, enquête, expertises médicales, audition des personnels, instruction… Ces délais peuvent décourager certaines familles.
Difficulté à prouver la faute
Dans le cas d’une escarre[2], il peut être difficile de démontrer que celle-ci est exclusivement due à un manque de soins, et non à l’état général du patient. Les établissements peuvent invoquer l’évolution naturelle de la maladie ou un refus de soins par le résident.
Classements sans suite fréquents
Certaines plaintes peuvent être classées sans suite, faute de preuves suffisantes. La responsabilité pénale d’une structure d’accueil pour personnes âgées n’est jamais automatique : elle suppose de démontrer une faute grave, caractérisée et documentée.
Face à la douleur causée par une escarre[2] qui aurait pu être évitée, les familles ont le droit d’exiger des comptes. Poursuivre un EHPAD[1] pour négligence n’est jamais une démarche facile, mais elle peut permettre de faire reconnaître une faute, d’obtenir réparation et d’éviter que d’autres résidents ne subissent la même souffrance.
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