Transmettre ses biens sans frais de succession : l’âge clé qui change tout

Transmettre ses biens sans frais de succession : l'âge clé qui change tout
Droits et Aides

En France, l’héritage reste une source de tension et d’inquiétude pour de nombreuses familles. Entre la peur de léser un proche et la crainte de voir une grande partie du patrimoine partir en impôts, beaucoup se sentent démunis face à la complexité des droits de succession, qui peuvent atteindre jusqu’à 45 % entre parents et enfants, et 60 % entre non-parents.

Pourtant, il existe de nombreuses solutions pour transmettre sereinement son patrimoine sans tout céder au fisc. Dans cet article, vous découvrirez les leviers légaux à votre disposition, les bons réflexes à adopter selon votre âge, et les stratégies qui permettent de réduire, voire d’éviter, les droits de succession grâce à une bonne anticipation.

L'âge idéal : entre 60 et 70 ans, un créneau décisif

Un chiffre s'impose : 100 000 € d'abattement par parent et par enfant, renouvelable tous les 15 ans. Cet avantage fiscal, prévu par le Code général des impôts, constitue la pierre angulaire d'une transmission réussie.

Pourquoi 60‑70 ans constitue une fenêtre stratégique

La tranche 60-70 ans est souvent fiscalement très favorable pour envisager une donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit, car le barème de la nue-propriété est alors à 60 % de la valeur du bien. Cependant, d’autres âges restent envisageables : l’essentiel est l’anticipation. 

Donner à 62 ans, c'est ne faire taxer que sur 60 % de la valeur du bien (et non 100 % en pleine propriété) : une aubaine, car vous restez chez vous, usufruitier, sans perte de contrôle. À 71 ans, la base imposable grimpe à 70 %. 

Cette fenêtre de tir, la décennie qui précède 70 ans concentre donc l'essentiel de l'optimisation. Commencer à 60-65 ans, voire un peu avant, permet même d'envisager une seconde transmission 15 ans plus tard, et d'additionner les abattements.

Senior qui fait une donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit

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Tableau : valeur fiscale de la nue-propriété selon l'âge du donateur

Âge du donateurPart taxable (nu-propriété)Usufruit conservé 
51-60 ans50 %50 %
61-70 ans60 %40 %
71-80 ans70 %30 %
81-90 ans80 %20 %

Ce tableau indique quelle part de la valeur du bien, selon l’âge de l’usufruitier, sera retenue pour calculer les droits de donation/succession. Il ne s’agit pas d’un « taux de taxation » mais d’une base d’imposition. 

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Stratégies concrètes pour transmettre sans droits

  • Donation en nue-propriété : le donateur conserve l'usufruit, les enfants recueillent la nue-propriété. À son décès, la pleine propriété se reconstitue sans impôt[2] supplémentaire. Idéal pour un bien immobilier, une résidence secondaire ou des parts de SCI.
  • Dons familiaux de sommes d'argent : jusqu'à 31 865 € par parent et par enfant, en plus de l'abattement classique, si le donateur a moins de 80 ans et le bénéficiaire au moins 18 ans.
  • Présents d'usage : cadeaux faits lors d'événements familiaux, non imposés s'ils restent raisonnables (<2,5 % du revenu annuel ou <2 % du patrimoine).
  • Assurance vie : versements effectués avant 70 ans, abattement de 152 500 € par bénéficiaire, quelle que soit la filiation. Au-delà, l'avantage fiscal se réduit fortement.
  • SCI familiale : intégrer un bien immobilier dans une société civile, puis transmettre progressivement les parts, en profitant des abattements tous les 15 ans. Permet aussi de garder la main sur la gestion.

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Exemple concret : comment un couple transmet un bien sans frais

Prenons un couple propriétaire d'une maison estimée à 250 000 €. Ils ont deux enfants. En réalisant une donation en nue-propriété à 65 ans, la valeur taxable tombe à 60 % de 250 000 €, soit 150 000 €, répartis à 75 000 € par enfant. Après abattement (2 × 100 000 €), aucune taxation. Seuls restent des frais d'acte notarié et droits d'enregistrement, bien moindres que les droits de succession.

Mieux : si le couple procède à une seconde donation 15 ans plus tard, il peut doubler le montant transmis sans droits. Ce mécanisme, longtemps sous-exploité, permet de protéger la transmission familiale sur deux décennies.

Les pièges à éviter, les points de vigilance

  • Attendre après 70 ans : les abattements sur l'assurance vie chutent, la valeur de la nue-propriété grimpe, les options se ferment. Les dons familiaux de sommes d'argent ne sont plus possibles passé 80 ans.
  • Oublier la déclaration : toute donation doit être déclarée par le bénéficiaire dans le mois (formulaire n°2735), sous peine de pénalités.
  • Ne pas consulter de notaire : chaque famille a ses spécificités. Un montage mal ficelé peut entraîner des redressements fiscaux ou des conflits entre héritiers. Les conseils d'un professionnel évitent les erreurs lourdes de conséquences.
  • Mauvaise utilisation de la SCI : attention aux frais de gestion, à la fiscalité des plus-values, à la rédaction des statuts. Ce véhicule doit être construit sur-mesure, pas en copier-coller.

Senior qui reçoit des conseils pour éviter les pièges

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Combien peut-on transmettre sans droits ?

  • Un couple avec deux enfants : jusqu'à 400 000 € (2 parents × 2 enfants × 100 000 €) tous les 15 ans, hors assurance vie, dons manuels, présents d'usage.
  • Assurance vie avant 70 ans : 610 000 € (2 parents × 2 enfants × 152 500 €).
  • Dons familiaux de sommes d'argent : 127 460 € (2 parents × 2 enfants × 31 865 €).

En cumulant toutes les stratégies, la transmission sans frais frôle, voire dépasse le million d'euros pour une famille moyenne. Chaque situation est unique : montages en SCI, donation en nue-propriété, assurance vie, etc., nécessitent un conseil notarial ou fiscal pour éviter tout redressement.

Questions fréquentes : la transmission sans frais en pratique

La donation en nue-propriété empêche-t-elle de vendre ou louer ?

Non. Le donateur conserve l'usufruit : il peut occuper le bien, le louer et percevoir les loyers. Pour vendre, il faut toutefois l'accord des nus-propriétaires.

Peut-on avantager un enfant sans enfreindre la loi ?

Oui, dans une certaine limite : la réserve héréditaire protège chaque héritier. Mais la quotité disponible (partie librement transmissible) permet d'avantager un enfant, sous réserve de respecter le cadre légal.

Que se passe-t-il si le donateur décède moins de 15 ans après une donation ?

La valeur des biens donnés est réintégrée dans la succession pour le calcul des droits (rappel fiscal). D'où l'intérêt d'anticiper, pour bénéficier du renouvellement des abattements.

Et pour transmettre à un neveu, un ami ?

L'assurance vie s'impose : abattement de 152 500 € par bénéficiaire avant 70 ans, sinon les droits de succession sont massifs (jusqu'à 60 %).

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