Lorsqu’un proche devient vulnérable, la question de sa protection juridique se pose. Mais qui prendra désormais les décisions à sa place ? Qui gérera ses papiers, ses finances, ou veillera à son bien-être ? Faut-il nécessairement qu’un tuteur ou curateur soit un proche de la personne protégée ? Faisons le point sur les règles légales, les critères du juge et les différentes situations possibles.
Tuteur/curateur proche personne protégée : que prévoit la loi ?
En principe, la protection juridique d’un majeur doit être assurée par la famille ou l’entourage proche, dans l’intérêt de la personne vulnérable.
Être tuteur ou curateur de son proche : le principe de la priorité familiale
Le Code civil consacre le principe de la priorité familiale. Lorsqu’il ouvre une mesure de tutelle[1] ou curatelle[2], le juge des tutelles[3] désigne en priorité un membre de la famille ou un proche de la personne pour exercer cette charge.
La loi du 5 mars 2007 a réaffirmé cette priorité familiale que le juge doit systématiquement rechercher.

Qui peut être considéré comme « proche » du majeur protégé ?
La notion de « proche » s’entend au sens large. Il s’agit d’abord des membres de la famille :
- le conjoint (époux ou épouse), le partenaire de PACS, le concubin ;
- les parents, enfants, frères et sœurs ;
- les alliés (belle-famille).
S’ajoutent les personnes de l’entourage ayant des liens étroits et stables avec le majeur protégé. Par exemple, un ami de longue date qui réside avec lui ou lui rend régulièrement service.
Pourquoi la loi favorise-t-elle la désignation d’un proche comme tuteur ou curateur ?
Désigner un proche comme tuteur ou curateur présente plusieurs avantages. Le membre de la famille ou l’ami connaît bien la personne protégée, son histoire, ses besoins et ses habitudes.
Par exemple, un parent aidant qui s’occupe depuis toujours de son enfant handicapé, ou un conjoint épaulant sa moitié atteinte de maladie, offriront une continuité dans la prise en charge.
La proximité affective facilite la confiance et assure que les décisions prises respecteront au mieux la volonté et l’intérêt de la personne vulnérable.
Les conditions juridiques pour devenir tuteur ou curateur
Le juge vérifie la capacité du candidat à assumer la mission et peut écarter un proche inapte pour protéger le majeur.
Les critères à remplir pour être désigné tuteur ou curateur
Le juge s’assure que le tuteur/curateur pressenti remplit les conditions légales :
- être majeur ;
- jouir de ses droits civils ;
- ne pas se trouver lui-même sous une mesure de protection.
Certaines personnes ne peuvent pas être nommées, par exemple un professionnel de santé pour son propre patient (sauf lien familial). Par ailleurs, la personne pressentie doit être disponible et intègre (pas de conflit d’intérêts financier, pas de condamnation incompatible, etc.).
| 💡La personne désignée reste libre de refuser cette mission, sans avoir à se justifier. |
Quand le juge écarte un proche pour préserver la personne protégée
La priorité familiale n’est pas absolue. Si le contexte familial est conflictuel, ou si le proche proposé est incapable d’assumer la charge (par manque de temps, problèmes de santé, éloignement géographique), le juge peut décider de ne pas le nommer.
L’objectif est toujours l’intérêt du majeur protégé. Le juge motivera sa décision de confier la tutelle[1]/curatelle[2] à un tiers si cela protège mieux la personne vulnérable.
Les différentes mesures de protection juridiques
La curatelle[2] est une mesure d’assistance. La personne conserve une autonomie pour les actes courants et le curateur l’aide ou co-signe les actes importants.
La tutelle[1] est plus contraignante. Le tuteur représente le majeur protégé dans (presque) tous les actes de la vie civile.
Le choix entre curatelle[2] ou tutelle[1] dépend du degré d’altération des facultés du majeur. Si aucun proche n’est disponible, le juge nommera un mandataire judiciaire (professionnel) pour exercer la mesure.
| 💡Des alternatives comme la sauvegarde de justice[4] (temporaire) ou l’habilitation familiale existent pour des situations particulières. |
LIRE AUSSI : Tutelle ou curatelle : comparatif, avantages et inconvénients[2][1]
Quand le tuteur/curateur n’est pas un proche de la personne protégée
Il arrive qu’aucun membre de la famille ou de l’entourage ne puisse (ou ne veuille) assumer la tutelle[1]/curatelle[2].
Le rôle du mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM)
Lorsqu’aucun proche adéquat n’est disponible, le juge désigne un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM). Il s’agit d’un professionnel agréé par l’État, inscrit sur une liste du préfet, et souvent rattaché à une association tutélaire ou exerçant à titre libéral.
Le MJPM a reçu une formation certifiante et doit posséder des compétences en droit, gestion et action sociale. Il est tenu de respecter les mêmes obligations qu’un tuteur familial (protéger la personne et ses biens, rendre des comptes au juge).

Les conséquences pour la famille quand un tiers ou un professionnel est nommé
Si un tuteur professionnel est nommé, la famille peut ressentir un soulagement administratif, mais aussi une forme de dépossession. Le mandataire judiciaire prend les décisions courantes et gère les finances, ce qui peut créer une distance, car il n’a pas le lien affectif qu’aurait un proche.
La famille conserve toutefois un droit de regard. Elle peut demander des informations, être désignée subrogé tuteur (contrôleur) ou alerter le juge en cas de problème.
| 💡 Les prestations du MJPM sont payantes, prélevées sur les ressources du majeur protégé (sauf si celui-ci dispose de revenus très modestes). |
Devenir tuteur ou curateur d’un proche : ce qu’il faut savoir avant d’accepter
Accepter d’être tuteur ou curateur d’un proche est une démarche volontaire qui implique des responsabilités.
Les responsabilités légales et pratiques de la mission de tuteur/curateur
Le tuteur/curateur doit gérer les biens et les décisions de la personne protégée avec prudence et diligence. Il doit rendre compte chaque année de sa gestion au juge des tutelles[3], à travers un inventaire et un compte de gestion.
Il a également l’obligation de respecter les droits et la dignité du majeur protégé. Il doit le consulter autant que possible pour les décisions le concernant, veiller à maintenir ses liens familiaux et sociaux, et s’assurer de son bien-être moral et physique.
En cas de difficulté ou de doute sur un acte important (par exemple vendre un bien), le tuteur doit solliciter l’autorisation du juge.
LIRE AUSSI : Le tuteur doit-il rendre des comptes à la famille lors de la mise sous protection d’une personne âgée ?
Conseils pour bien accompagner la personne protégée au quotidien
Avant d’accepter, posez-vous quelques questions. Aurez-vous assez de temps à consacrer à cette charge ? Êtes-vous prêt à assumer ces responsabilités vis-à-vis de votre proche ? Ce rôle peut-il affecter votre relation avec le majeur protégé ou l’équilibre familial ?
Pour bien accompagner votre proche, informez-vous sur la tutelle[1]. Il existe des guides pratiques pour les tuteurs familiaux, comme celui de l’Unaf. N’hésitez pas à solliciter de l’aide. Vous pouvez demander conseil à un professionnel (avocat, notaire) ou rejoindre des associations de familles tutrices pour vous former.
Impliquez autant que possible la personne protégée dans les décisions la concernant et communiquez de façon transparente avec les autres membres de la famille afin d’éviter les conflits.
Le juge apprécie chaque situation et choisit toujours la solution la plus protectrice pour la personne concernée. Chacun peut anticiper sa propre protection juridique en exprimant à l’avance ses préférences (par exemple via un mandat de protection future), afin de soulager ses proches et garantir le respect de sa volonté le moment venu.
FAQ
Faut-il être parent pour être nommé ?
Il n’est pas nécessaire d’être le parent de la personne protégée pour devenir son tuteur/curateur. Toute personne proche et de confiance (famille élargie, ami) peut être désignée, voire un professionnel en l’absence de proche disponible.
Et si je vis loin de la personne protégée ?
La distance géographique n’interdit pas d’être tuteur, mais le juge en tiendra compte. Si vous vivez loin, vous devrez prouver votre capacité à gérer la tutelle[1] à distance (déplacements, disponibilité).
Puis-je être tuteur et être salarié dans l’établissement de la personne ?
En principe, les professionnels de santé ne peuvent pas être tuteurs de leurs propres patients. Toutefois, si aucun proche n’est disponible, un salarié peut être désigné comme « préposé d’établissement ».
Quelles sont les conséquences si je refuse ?
Être tuteur/curateur n’est pas une obligation légale. Si vous refusez la mission, le juge recherchera une autre solution. Souvent, il nommera un mandataire judiciaire professionnel à la place.
Que faire si la personne protégée veut désigner quelqu’un d’autre ?
Le majeur protégé peut proposer un tuteur ou curateur de confiance. Il peut aussi anticiper sa désignation devant notaire. Le juge en tient compte ou peut modifier la désignation si cela sert son intérêt.






Laissez un commentaire